Congreso por la Libertad de la Cultura
Manifeste aus Hommes Libres
Congrès International pour la Liberté de la Culture
Juin 1950
1 Nous considérons comme une vérité évidente que la liberté d’opinion est un des droits inaliénables de l’homme.
2 La liberté d’opinion est, avant tout, la liberté pour chacun de se former une opinion et de l’exprimer, même et surtout quand cette opinion n’est pas conforme à celle des gouvernants. L’homme qui n’a pas le droit de dire « non » est un esclave.
3 Paix et liberté sont inséparables. Partout, sous tous les régimes, la grande majorité du peuple redoute la guerre et la condamne. Le danger de guerre grandit dès qu’un gouvernement supprime les institutions représentatives et dépossède la majorité des moyens qu’elle a d’imposer sa volonté de paix.
La paix sera sauvegardée :
Si chaque gouvernement soumet ses actes au contrôle populaire ;
Si chaque gouvernement s’engage à soumettre à une autorité internationale les conflits qui comportent un risque de guerre ;
Si chaque gouvernement s’engage à respecter les décisions de cette autorité internationale.
4 Les responsables de l’actuel risque de guerre sont les gouvernements qui, tout en parlant de paix, refusent de reconnaître le contrôle populaire et l’autorité internationale. L’histoire nous a appris que tous les slogans sont bons, y compris ceux de la paix, à qui veut préparer la guerre. Des « croisades pour la paix », que ne confirme aucune action réelle en faveur du maintien de la paix, ne sont que fausse monnaie. Tant qu’on emploiera ces méthodes, il n’y aura pour les hommes ni sécurité physique, ni santé morale.
5 Il est de la nature même de la liberté de respecter la diversité des opinions. Mais le principe de tolérance n'implique pas logiquement le respect de l'intolérance.
6 Aucune doctrine politique ou économique ne saurait prétendre déterminer seule le sens de la liberté. C'est selon la mesure de liberté réellement dispensée à l'individu qu'on juge les doctrines et les idéologies.
De même, aucune race, aucune nation, aucune classe, aucune religion ne saurait prétendre au droit exclusif de de représenter la liberté, encore moins de la refuser à d'autres groupes ou à d'autres croyances, au nom d'une fin ultime, quelle qu’elle soit.
7 En période de crise, des restrictions sont imposées à la liberté, au nom de l'intérêt général, bien ou mal conçu. Nous tenons pour essentiel que de telles restrictions soient limitées à quelques domaines clairement définis. Expédients temporaires, sacrifices que la communauté s’impose, ils doivent rester soumis à la libre critique et au contrôle populaire. À ces conditions seulement, on évitera que les restrictions exceptionnelles de la liberté ne dégénèrent en tyrannie permanente.
8 Dans les États totalitaires, les entraves à la liberté ne sont plus présentées comme des sacrifices imposés au peuple. Au contraire, on les exalte comme le triomphe du « progrès » et comme « l’apogée d’une civilisation nouvelle ». En droit et en fait, les régimes totalitaires signifient la mort des droits fondamentaux de l’individu et des aspirations essentielles de l’humanité.
9 Il n’y aura pas de stabilité dans le monde tant que l’humanité sera divisée entre ceux qui ont conservé la liberté et ceux qui l’ont perdue.
La défense des libertés existantes, la reconquête des libertés perdues, la reconnaissance de libertés nouvelles sont le prix d’un seul et même combat.
10 Nous considérons que le danger des régimes totalitaires est d’autant plus grand que les moyens de contrainte dont ils disposent dépassent de beaucoup ceux auxquels ont jamais eu recours, dans le passé, les despotismes. Le citoyen de l’État totalitaire est non seulement contraint de s’abstenir de toute violation des lois, mais encore de conformer toutes ses actions et toutes ses pensées sur un modèle prescrit. La forme classique de la « tyrannie négative » a été supplantée par la « tyrannie positive ». Les citoyens sont persécutés et condamnés en raison d’accusations vagues et indéterminées, comme par exemple d’être des « ennemis du peuple » ou des « éléments socialement dangereux ».
11 Nous considérons que la théorie et la pratique des États totalitaires sont la plus grande menace que l’humanité ait dû affronter au cours de son histoire.
12 L’indifférence et la neutralité envers une pareille menace constituent une trahison à l’égard des valeurs essentielles de l’humanité et une abdication de l’esprit libre. Le destin de l’humanité, pour des générations, peut dépendre de la réponse que nous donnerons à ce défi.
13 La défense de la liberté, la défense de l’esprit exigent de nous des solutions neuves et constructives aux problèmes de notre temps.
14 Nous adressons ce Manifeste à ceux qui sont résolus à restaurer, à sauver, à étendre les libertés qui font le prix de la vie.
PRÉSIDENTS D'HONNEUR
Benedetto CroceKarl JaspersJohn Dewey
Jacques MaritainSalvador de MadariagaBertrand Russell
Voici une première liste de personnalités du monde entier qui, entre autres, ont adopté et signé le texte de ce manifeste :
Altman Georges, France.
Amery Julian, Angleterre.
Brown Irving, U.S.A.
Brugmans Hendryck, Hollande.
Brunschvicg Henri, France.
Buber Neumann Margarete, Allemagne.
Burnham James, U.S.A.
Czapski Josef, Pologne.
Farell James T., U.S.A.
Frenay Henri, France.
Hook Sidney, U.S.A.
Humbaraci Aslan, Turquie.
Koestler Arthur, Angleterre.
Kogon Eugen, Allemagne.
Lie Haakon, Norvège.
Lipper Ellinor, Suisse.
Lombardi Franco, Italie.
Montgomery Robert, U.S.A.
Muller Hermann J., U.S.A.
Nabokow Nicolas, U.S.A.
Nerman Ture, Suède.
Nicolajewski Boris, Russie
Oprecht Hans, Suisse.
Philip André, France.
Piovene Guido, Italie.
Plievier Theodor, Allemagne.
Plisnier Charles, Belgique.
Read Herbert, Angleterre.
Röpke Wilhem, Suisse.
Romain Jules, France.
Rougemont Denis (de), Suisse.
Roure Rémy, France.
Rousset David, France.
Schlesinger Arthur M. Jr., U.S.A.
Schmid Carlo, Allemagne.
Schuyler George, U.S.A.
Schwartz Salomon, Russie.
Spinelli Altiero, Italie.
Strasser Peter, Autriche.
Tecchi Bonaventura, Italie.
Thirring Hans, Autriche.
Trevor-Roper H. R., Angleterre.
Weber Alfred, Allemagne.
Yergan Max, U.S.A.
Les personnalités suivantes ont, entre autres, donné leur appui au Congrès International pour la Liberté de la Culture :
Aron Raymond, France.
Baldwin Roger, U.S.A.
Barth Hans, Suisse.
Broglie Louis (de), France.
Bunche Ralph, U.S.A.
Chiaromonte Nicola, Italie.
Counts George S., U.S.A.
Crossmann R. H. S., Angleterre.
Dos Passos John, U.S.A.
Duhamel Georges, France.
Fischer Louis, U.S.A.
Fischer Ruth, U.S.A.
Gide André, France.
Gollancz Victor, Angleterre.
Grosz George, U.S.A.
Huxley Julian, Angleterre.
Levi Carlo, Italie.
Lilienthal David, U.S.A.
Low David, Angleterre.
Madariaga Salvador (de), Espagne.
Malraux André, France.
Marcel Gabriel, France.
Mc Cormick Anne o'Hare, U.S.A.
Mc Cullers Carson, U.S.A.
Mitscherlich Alexander, Allemagne.
Monnerot Jules, France.
Niebuhr Reinhold, U.S.A.
Reuther Walter, U.S.A.
Roosevelt Eleanor, U.S.A.
Schneider Reinhold, Allemagne.
Sinclair Upton, U.S.A.
Sperber Manès, France.
Supervielle Jules, France.
Ward Barbara, Angleterre.
Williams Tennessee, U.S.A.
Zuckmayer Carl, U.S.A.
Le Comité exécutif, qui a été chargé à Berlin d'assurer la continuité des travaux du Congrés, est composé de :
Stephen SpenderDenis de Rougemont
Irving BrownArthur KoestlerEugen Kogon
[ Texto íntegro impreso en un díptico difundido por el Congreso por la Libertad de la Cultura. ]